Est-ce que l’oiseau ressent le besoin de posséder la branche sur laquelle il construit son nid, ou l’ours la grotte qui l’abritera pendant la saison d’hibernation? Le besoin de posséder est-il intrinsèque à l’espèce humaine? A mon sens, ce besoin est corollaire à la sédentarisation. Auparavant le nomadisme obligeait l’homme à mettre en commun toutes ses ressources dans un souci de protection et de survie. Le bien être de la communauté passait avant celui de l’individu. Depuis que la notion d’espace est devenue divisible, que l’homme a érigé des murs pour se protéger du reste de ses semblables, il fallait meubler l’espace cloisonné qu’il s’est construit. La notion de besoin matériel est apparue. Il ne s’agit plus seulement de besoin physiologique comme boire et manger, ou de se protéger du froid et des prédateurs, mais d’un besoin de tout autre nature. Le sentiment et le désir d’être propriétaire de quelque chose que ne possède pas son voisin. Il s’est assujetti au besoin de possession. De cette exigence est né le sentiment qu’on ne peut subsister sans telle ou telle chose.
Beaucoup de personnes pensent que plus elles accumuleront de biens plus elles seront heureuses: J’ai besoin de manger, cependant mon frigidaire doit être plein. J’ai besoin de me vêtir, mon placard doit être garni de jolies choses à porter. J’ai besoin d’un toit, ma maison doit être spacieuse et remplie d’objets agréables à regarder… j’ai besoin d’aimer, l’objet d’amour doit m’appartenir. Oui, le besoin de posséder ne se réduit pas uniquement aux acquisitions matérielles, mais englobe tout aussi bien les personnes.
Seulement ce besoin de possession est souvent source de grande souffrance, de désirs jamais assouvis et de continuelles frustrations. Il est aussi source de nombreux conflits, de batailles féroces lorsque l’objet du désir est en plus convoité par d'autres. Avec l’acquisition commence le souci et la peur de le perdre. Nous perdons ainsi la liberté d’avoir l’esprit libre. Nous devenons possédés par nos possessions. Il en est de même dans les relations affectives. Il est totalement antinomique de prétendre aimer quelqu’un et le soumettre à son désir. Une relation saine ne devrait t-elle pas être basée sur l’échange, l’harmonie, le partage et le respect? Tout comme la relation que nous entretenons avec la terre. La terre donne ses fruits, mais elle prie silencieusement pour que nous partagions ses richesses et que nous protégions l’arbre qui les nourrit.
Je terminerais avec une petite parabole que j’ai lue il y a longtemps, qui à mon sens symbolise d'une autre manière la notion de se détacher de ses possessions. "Un pauvre homme qui n’avait pour seule richesse qu’un pot de terre dans lequel il mangeait, priait Dieu. Il lui demandait de juger de son destin, pensant que sa place devait être au plus près de lui, parce qu’il était pauvre alors que les autres possédaient mille biens. Un ange lui est alors apparu et l’a vite transporté au dessus de la propriété d’un riche seigneur. Il lui montra la splendeur de la maison, les vastes vergers, les champs cultivés et les grands troupeaux d’animaux. Le pauvre dit aussitôt à l’ange qu’il sera certainement difficile à ce seigneur d’entrer au paradis. L’ange l'éclaira en lui expliquant que ce seigneur bien que riche est beaucoup moins attaché à ses possessions que lui à son pot de terre, qu'il se sert de ses richesses pour servir les autres, tandis que lui semble attaché à sa pauvreté comme à un bien personnel."
"Avec l’acquisition commence le souci et la peur de le perdre. Nous perdons ainsi la liberté d’avoir l’esprit libre..."
si tout le monde pensait ainsi il n'y aurait pas eu de crise des subprimes... et tout ce qu'elle a engendré!!!
Rédigé par : raja | 14 mai 2009 à 09:54
L'adage selon lequel "le monde appartient à ceux qui n'ont rien" abonde dans ton sens. Possédons nous nos corps?
Nos coeurs ne semblent s'exprimer que sous l'emprise de sentiments qui nous dépassent. Respiration, digestion, sommeil, désirs, peurs et pensée obéissent à des mécanismes indépendants de notre volonté au point qu'on ne sait plus vraiment qui sert de véhicule à qui.
L'histoire de l'archéologie révèle que les groupes humains qui ont résisté aux aléas du temps sont restés cramponnés à des ustensiles nécessaires sans sombrer dans l'hystérie de l'objet.
Sujet audacieux que celui que tu as choisi !
Rédigé par : Yugurta | 14 mai 2009 à 12:27
Il y a plusieurs thématiques dans ton écrit.
Il y a la possession de manière générale... et puis il y a le toit, la maison...
Aujourd'hui et à ce que je ressens et vois autour de moi, le toit joue plus le rôle d'un protecteur qu'autre chose.. Avoir un toit pour la grande majorité du temps, c'est se protéger contre les aléas de la vie.. On a l'impression qu'en ayant un toit on ne pourra jamais se retrouver à la rue. La rue fait peur, rebute etc..
Rédigé par : Doudou | 14 mai 2009 à 12:44
posséder c'est exister via le bien !! on commence par prétendre posséder la chose et on finit possédé par la chose et aussi par ses démons :)
Rédigé par : Agharass | 14 mai 2009 à 13:03
"Toute joie veut l'éternité de toute chose, veut le miel, elle veut du levain, un minuit ivre, elle veut des tombes, elle veut un crépuscule doré,
qu'est ce que ne veut pas la joie! Elle est plus assoiffée,plus cordiale, plus affamée, plus effrayante, plus secrète que toute douleur, elle se veut, se mord elle même, la volonté de l'anneau lutte en elle..."
ainsi parlait Zarathoustra.
la possession n'est que le désir de posséder qui se manifeste. le moteur de la vie est le désir. saurions nous le réguler? telle est la question Flower
Rédigé par : kalimate | 14 mai 2009 à 15:12
Kalimate: j'ai lu ainsi parlait Zarathoustra il y a vraiment longtemps, et il revient beaucoup chez toi et chez quelques auteurs que j'ai lu récemment... je crois que je dois arrêter de lire ce que j'ai en cours et reprendre cet incontournable livre...
Je serais ainsi sur la même longueur d'onde que toi
Rédigé par : Doudou | 14 mai 2009 à 19:22
Reponse à la premiere question: L'oiseau ne veut pas que l'on touche aux oeufs dans son nid. L'oiseau veut seulement qu'on le laisse en paix du moins pendant la periode de couvaison et le temps que les oisillons puissent voler de leur propres ailes pour une nouvelle liberte commune. Est ce à dire que les oiseaux préfèrent la location à l'achat? En tout cas, ils ont un bec contre le leasing ...
Rédigé par : kalimero | 15 mai 2009 à 00:35
c'est un beau livre! je te le conseille vivement. agréable à lire et contient un énorme enseignement.
c'est mon livre de chevet.
sage, simple.
Rédigé par : kalimate | 15 mai 2009 à 00:47
wa kalim, doudou, dites moi est ce que Flower possède une maison ou non?
je ne vous cache pas, chez nous à Marrakech il ya un "salih"(marabout) sidi abdelaziz où les gens accrochent des cadenas pour avoir des maisons...
regarder la foto!!! :-)
Rédigé par : kalimate | 15 mai 2009 à 02:12
c'est un très beau texte avec plein de sujets, sur le désir de possession, des objets mais aussi des personnes par rapport à une relation amoureuse etc.
Rédigé par : mamoun | 15 mai 2009 à 19:42